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« Vous me le garantissez, mon retour sur investissement ? »

Avec Benjamin Viguier, coach-formateur, nous vous proposons une chronique mensuelle dans laquelle il utilise le style narratif pour faire émerger un point sensible du métier de technico-commercial. © S. BENSIZERARA

La chronique de Benjamin Viguier, consultant formateur du Réseau Motival. Son job : former les équipes terrain aux démarches commerciales. Pour cette première, il relate la nécessité du changement de posture du TC face à l’agriculteur.

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Il est 19 h, un vendredi du mois de mars. Je sors d’une semaine de formation et d’accompagnement terrain pour un grand distributeur agricole sur le portage des offres à forte valeur ajoutée. En clair, des offres qui englobent services, conseils et produits et qui, bien souvent (on ne va pas se mentir), se positionnent en termes de prix bien au-dessus de la concurrence ou de ce que fait l’agriculteur. J’aurais d’ailleurs pu titrer : « Et alors ça coûte combien ? », dans le hit-parade des phrases les plus citées par les agriculteurs visités cette semaine. Savoir défendre des offres qui coûtent plus cher mais rapportent davantage aux agriculteurs : voilà le défi que je devais relever avec le distributeur.

Se mettre en phase d’écoute

Tout d’abord, nous avons soigneusement préparé notre action. Pour cela, nous sommes passés par un microciblage (quelques agriculteurs par portefeuille), puis par des moments d’écoute spécifiques, déconnectés de nos visites de proposition. Il s’agit en fait d’être attentif à se positionner sur les attentes des agriculteurs et non leurs besoins. Qu’un céréalier ait besoin d’ammonitrate nous importait peu. Nous souhaitions identifier les attentes profondes des agriculteurs pour ne pas être réduits à devoir raconter des histoires de prix une fois en proposition. « Générer plus de revenus », « vivre de mon activité », « sortir plus de marge », « intégrer des cultures à plus forte valeur ajoutée » sont très largement revenus lors de ces phases de (re) découverte.

Une vraie révélation pour certains TC

Ainsi, pour la préparation des visites de proposition, nous savions qu’il faudrait parler euros tout en se donnant une seule et unique consigne : répondre à la question primordiale du pourquoi. « Pourquoi tous les agriculteurs que nous allions revoir devraient-ils changer leurs pratiques (qu’ils jugent pertinentes, sinon ils feraient différemment…) ? » Nous nous sommes alors attachés à apporter la preuve par le revenu. Sans relâche, nous avons brassé des euros dans tous les sens, calculant et justifiant chaque euro pour permettre aux agriculteurs rencontrés de faire le parallèle entre investissement et retour sur investissement.

Cependant, il a fallu que chaque TC lève ses propres freins : maîtrise approximative des chiffres clés, peur d’annoncer un retour sur investissement, incapacité à être actif en conclusion. Thomas Edison disait : « Les gens qui réussissent ont l’habitude de faire ce que les gens qui échouent n’aiment pas faire ». Alors nous l’avons fait. Les jolis résultats de la fin de semaine sont encourageants pour certains, une vraie révélation pour d’autres.

Abandonner ses croyances

Toutefois, j’ai vécu pendant ces semaines d’accompagnement un contraste à l’origine du titre de cette chronique. Lors des mises en situation en salle, avant les journées d’accompagnement terrain, l’objection « Vous me le garantissez ? » est revenue dans 100 % des sketches. Chaque TC qui jouait l’agriculteur ponctuait la démonstration économique de son collègue par un « OK, mais vous me le garantissez, votre retour sur investissement ? ». Or, une fois sur le terrain, cette phrase est revenue dans seulement… 10 % des cas !

Je me suis demandé pourquoi. Aujourd’hui, la posture du TC doit changer du fait notamment du désir d’autonomie dans leur prise de décision des nouvelles typologies d’agriculteurs. Il s’agit donc de devenir un partenaire qui accompagne l’agriculteur dans sa prise de décision. Devoir garantir un résultat impacté par de multiples facteurs (dont la météo dans de nombreux cas) n’a pas de sens. Mais tout le monde le sait. L’important reste donc de chiffrer les enjeux économiques pour faciliter la prise de décision des agriculteurs dans un contexte mouvant !

Mais finalement, ne serait-ce pas également que le pire ennemi du vendeur reste… le vendeur lui-même ?

Benjamin Viguier (b.viguier @motival.fr)

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